confinement, un jour
Je découvre qu'on peut avoir un léger cafard du dimanche soir, même en plein confinement quand le lendemain ressemblera en tous points au jour même (à part qu'il faudra que je bosse, mais bon, ça me fait plaisir !), et alors qu'on n'a même pas regardé Benny Hill.
Ce qui est effrayant dans ce confinement, le fait qu'on ne sait pas trop combien de temps il va durer et quand il prendra fin, est aussi ce qui m'y plaît terriblement : être assignée à résidence avec J. et J., à l'infini. Il y a un grand bonheur dans ce tracas. Je pourrais me lover là-dedans et m'y laisser mourir de complétude. Je suis sûre que la joie de retrouver l'air frais, mes jambes, la nature, quand nous serons de nouveau libres de nos mouvements, sera accompagnée d'une petite violence, de devoir sortir de cette coquille, voler hors du nid, me séparer d'eux, communiquer avec d'autres humains que je connais moins. Je suis confinée, confinée dans ma zone de confort.
Nous avons fini par prendre possession du parking derrière l'immeuble. Au départ, je n'étais pas hyper chaude (quand on est confinés, on doit rester enfermés sans sortir comme des sardines dans leur boîte), je suis une fille assez jusqu'au-boutiste. Et puis clairement, au bout de cinq jours, c'était devenu trop difficile pour Jo, il était même devenu un peu trop pâle et tristoune. Ses branches ployaient vers le bas et ses feuilles commençaient à sécher et à s'enrouler sur elles-mêmes. Alors on s'est autorisé la cour qui sert de parking, à un moment où il n'y avait personne d'autre, et avec comme consigne de ne toucher à RIEN dans la cage d'escalier, pas la rampe, pas le mur, on se donne la main et c'est tout.
J. et J. ont dessiné toutes sortes de parcours avec les craies de trottoir que nous avions eu la riche idée d'acheter en février. J. a pû faire de la trottinette, courir, sauter. Ses feuilles sont redevenues bien vertes. Ça nous a changé la vie.
Les dessins sont restés sur le parking, et plusieurs fois dans la même journée, des cris joyeux nous ont attirés vers la fenêtre de la cuisine, d'où nous avons pu voir les autres enfants de l'immeuble, jouer sur le parcours, chacun leur tour.
J'ai bien aimé ce partage du parking, sans se concerter, mais en faisant attention à ne pas se croiser.
J'ai rêvé à un "après" où le parking serait devenu une aire de jeu pour les enfants de l'immeuble, autant qu'un parking. Qu'ils puissent se retrouver pour y jouer ensemble. Venir sonner les uns chez les autres pour se rassembler. Je me suis même vue, dans trois semaines, toujours confinée, sortir faire des plantations dans je ne sais quel contenant sur notre place de parking laissée vacante.