Je suis bouleversée par les attentats bruxellois. J'ai peur des attentats. J'ai tremblé longuement quand vers midi j'ai allumé mon ordinateur et découvert ce qui s'était passé. J'ai découvert l'encore plus de peur qu'ajoute le fait de parfaitement visualiser les lieux et l'ambiance. J'ai appris que dans le métro, il y avait une fille que je connais. Pas quelqu'un que je connais super bien, pas une amie, mais une fille adorable qui a participé en même temps que moi au fameux fanzine bruxellois, une fille qui bossait dans un magasin juste à côté de l'endroit où j'achetais mes fruits et légumes, et avec qui j'ai eu parfois l'occasion de discuter, en passant devant sa boutique. C'est elle qui m'a appris à ne pas laver ma boule à thé (seulement la rincer), puisque de toute façon l'eau très chaude du thé tue les microbes qui pourraient être dessus. Elle a rencontré Joachim, elle connaît Jérome, elle nous a déjà offert un thé dans le magasin parce qu'il n'y avait pas de clients et qu'elle est hyper gentille, j'ai souvenir de quelques disucssions que nous avons eues ensemble. De cette fille, depuis mardi, plus personne n'a eu de nouvelles. J'ai les yeux carrés aujourd'hui à force d'avoir passé ma semaine à consulter facebook pour savoir si il y avait du nouveau, j'ai passé quelques nuits blanches à penser à elle, j'ai une boule qui se balade entre mon oesophage et mon foie.
Je repense à la dernière fois qu'on l'a croisée, juste avant de déménager, je voudrais revivre ce moment et lui dire d'éviter de prendre le métro en mars, j'imagine que si ça se trouve, mardi matin, elle s'est dit qu'elle en avait marre de sa vie et qu'elle a décidé de fuir sans se retourner, et que donc elle n'était pas dans le métro mais dans un train pour Ploutzek-les-Oies.
Je pense à ce qu'elle a sûrement vécu mardi et si elle y a succombé, j'espère que ce fut bref, instantané, sans temps pour avoir peur et sans douleur. Je pense qu'on lui a probablement volé sa vie et qu'on ne pourra pas lui faire justice et ça me désole complètement. Je me sens si triste.
Je lis les infos, beaucoup trop, j'ai le sentiment que tout se barre en couilles, je flippe. Je ne crois plus à la politique politicienne, je ne fais plus confiance.
Pour contrebalancer, j'essaye de penser à toutes les super initiatives qui fleurissent partout pour un monde meilleur.
Je décide ce matin de relire Résister, c'est créer De Florence Aubenas et Miguel Banasayag, qui m'avait fait tant de bien quand je l'avais lu dans notre deuxième appart' bruxellois. Et cette relecture, c'est une excellente idée pour se faire du bien et pour se motiver à aller de l'avant malgré le côté un peu foutu de chez foutu du monde tel qu'on nous le présente en ce moment.
Je vais recopier ici la 4ème, et je vous encourage à le lire vous aussi si vous vous sentez découragés...
"Depuis quelques années, dans les sociétés du Nord comme dans celles du Sud, une contre-offensive souterraine est en marche. Une contre-offensive qui est loin de se limiter à ses expressions les plus visibles, celles des mouvements "anti-mondialisation". Dans cet essai, le philosophe Miguel Benasayag et la journaliste Florence Aubenas en proposent une analyse originale, nourrie de nombreux exemples.
Ils montrent que les formes de cette "nouvelle radicalité" sont multiples et très diverses : certaines sont éphémères, d'autres s'inscrivent dans le long terme ; certaines revendiquent une "subjectivité contestataire", d'autres se veulent simplement pragmatiques. Mais tous ceux qui les portent partagent, sans nécessairement en être conscients, des traits communs. Ils s'inscrivent en rupture par rapport à l'individualisme triomphant des dernières décennies et le néolibéralisme n'est plus pour eux un "horizon indépassable". Et ils rompent également avec les formes anciennes de la contestation : ils n'agissent plus en fonction de modèles de sociétés prédéfinis ou de directives d'un parti à la conquête du pouvoir.
C'est un nouveau "désir de lien" que recherchent aujourd'hui des millions de personnes à travers le monde. Des universités populaires en France et en Argentine aux expériences de psychiatrie alternative, des mouvements de paysans sans terre latino-américains aux mobilisations européennes pour les sans-papiers, les auteurs montrent comment ce désir de lien a commencé à saper le projet majeur du capitalisme, celui d'un monde unique et centralisé. Et comment cette multiplicité joyeuse ouvre la voie d'une lecture alternative de l'économie."
Ce livre date de 2002 donc on peut s'imaginer à quel point toutes ces initiatives dont il parle ont pu s'étoffer depuis ! Se multiplier !
Et puis ce matin, au réveil, j'allume l'ordinateur (pour voir si il y avait des nouvelles de ma copine sur facebook...) et je tombe sur cet article qui m'explique que je vais encore pouvoir m'éclairer, même pas à la bougie, et sans centrale nucléaire !
samedi 26 mars 2016
Commentaires sur Je suis bouleversée par les attentats bruxellois.
- J'ai pensé à toi quand j'ai su. C'est bizarre mais c'est comme ça. Et aussi à la neige, parce qu'il neigeait quand j'ai découvert Bruxelles. Je note le livre dont tu parles sur ma liste "à emprunter à la bibli". Vu que je me sens découragée, ça ne peut qu'aider.
- Oh Couac, j'ai tellement pensé à toi aussi, à tes amis de Bruxelles et puis à mon petit frère qui vit à Liège maintenant mais qui a tous ses amis de quand il est devenu un jeune adulte et puis à mon amie Blanche et puis à ma copine parisienne qui pleure toutes les nuits quand elle repense à son dernier concert qui ne s'est jamais fini et je suis comme toi, déboussolée, terrifiée, incapable de panser les miens alors je leur dis léchez vos plaies, léchez vos plaies et laissez moi vous prendre dans mes bras, même en pensée. Take care.
- j'attendais des nouvelles par ici et j'espérais que tout allait bien pour les amis laissés là bas! Cette personne n'était peut-être pas une très proche mais ça doit faire sacrément quelque chose quand ces horreurs ne restent pas un truc confus qui arrive aux autres! J'imagine que tout d'un coup, on prend encore plus conscience du danger!
ces initiatives nouvelles qu'évoque le livre sont le seul petit bourgeon d'optimisme auquel on peut se raccrocher en ce moment! - Pour l'avoir connue plusieurs heures en janvier et un peu mais de façon moins intime (et qui c'est mieux terminée) en novembre, je sais l'effet de ce genre d'attente.
Oui les textes de personnes comme Florence Aubenas peuvent aider. On n'a pas le choix il faut tenter d'avancer (et sans se laisser contaminer par la haine).
C'est sans doute égoïste mais j'étais soulagée de vous savoir probablement loin de Bruxelles tous les trois.
Courage. - Que de peur(s), que de tristesse(s).
Et pourtant, l'article sur le Pérou est super, et j'irai emprunter le livre de F. Aubenas et as-tu vu "Le sel de la terre", de Wim Wenders, sur le travail de Sebastiao Salgado ? Le film est beau, les photos fabuleuses (très dures, quand elles montrent la famine, la guerre, la douleur), et surtout Salgado arrive à garder espoir et à AGIR. - Que de tristesse ces jours-ci, à la fois pour l'horreur absolue et tellement absurde pour tous ces morts, blessés et disparus (j'ai croisé partout dans la ville des portraits de la jolie demoiselle brune à lunettes pour qui tu t'inquiètes je crois...)... et pour en effet tout ce regard que la politique, les failles béantes, et le dégoût qui s'ensuit... Merci de donner des raisons d'espérer dont j'ai vraiment besoin...
- Ce qui me met le plus en colère c’est que ces crétins occupent quotidiennement nos cerveaux. Ce qui me met en colère c’est d’être atteinte pas ces imbéciles. Ce qui me met en colère c’est de partager notre monde originellement si beau avec des enflures. Ce qui me met en colère est que nous n’avons aucune prise contre ces demeurés sinon à utiliser leurs méthodes.
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